TROPICAL MAGAZINE, 2011

TROPICAL MAGAZINE, 2011

LA NATURE A DU TALENT

Rédaction : Dr. Léonide Celini, Biologiste

Préserver la belle diversité de notre nature

A Saint-Barthélemy, la beauté de la nature incite à découvrir la biodiversité exceptionnelle qu’elle abrite et à la préserver pour l’intérêt écologique, économique et sociétal qu’elle représente. Préserver sa biodiversité, connaître ses bienfaits, et maintenir intact ses différents habitats c’est garantir l’avenir des habitants de St Barth et de leurs générations futures.

En parcourant l’île, on peut admirer différents écosystèmes, de la mangrove riche en palétuviers à des écosystèmes typiques de zones sèches avec des habitats très spécialisés, qui font son originalité. Certaines espèces remarquables comme le Gaiac (Lignum vitae) surexploitée pour son bois, ou encore le cactus tête d’anglais (Melocactus intortus), décimé par la maladie et par l’homme, sont préservées et font partie du patrimoine culturel des Saint-Barthinois. D’autres mériteraient d’être préservées, comme le latanier (Sabal questeliana), matière première d’un savoir-faire artisanal traditionnel (fabrication de chapeaux, d’éventails, de corbeilles, paniers etc.) qui a fait la renommée de l’île.

Les randonneurs, passionnés par la nature, seront émerveillés par certains reptiles endémiques, dont certains protégés, tel que l’iguane des petites Antilles (Iguana delicatissima). Il a été signalé dès 1788. Actuellement, il est présent partout, mais surtout dans la partie nord de l’île. C’est un lézard magnifique de 1 à 2 m de long, avec un fanon gulaire un peu plus développé chez le mâle, qui l’utilise comme un élément de séduction lors de sa parade nuptiale.

L’observation de la couleuvre Alsophis rygersmaei, un des serpents les plus rares des Antilles, fera le bonheur des herpétologues. Mais on ne peut occulter les dangers que représentent certaines espèces envahissantes introduites dans l’île par la négligence ou l’inconscience des hommes et qui menacent les espèces autochtones. L’iguane commun, Iguana iguana, est une espèce anthropophile et opportuniste en pleine expansion. Elle est

arrivée dans l’île beaucoup plus tard que l’iguane des petites Antilles et occupe de plus en plus son habitat originel ; leur hybridation est un facteur déterminant de la raréfaction de l’iguane des petites Antilles, qui est ainsi menacée d’extinction.

La rainette de Cuba, Osteopilus septentrionalis, a été découverte pour la première fois en 1996, et se trouve actuellement sur la presque totalité de l’île. Elle est arrivée probablement avec les conteneurs de terre et de plantes en provenance de Floride. Elle représente un danger car c’est un invasif, très performant et un hyperprédateur d’insectes ou de lézards. Ces exemples témoignent de la nécessité de contrôles douaniers pour éviter l’arrivée de nouveaux indésirables dans l’île. Il faut prendre des mesures pour re-créer des habitats pour les espèces menacées, afin de sauvegarder une biodiversité unique au monde.

De grosses termitières en cartons (25-40 cm de haut), de structure assez compliquée, dressées sur des branches ou au pied des manguiers, quenettiers ou mapous, construites par des termites arboricoles, vous laisse surpris et admiratif à la fois face à l’ingéniosité de ce petit insecte de 2 à 3 mm de long. La termitière abrite une colonie populeuse de milliers d’individus, organisée en société hiérarchisée avec des castes (ouvriers, soldats, le couple royal), où la division du travail est la règle. Des ouvriers collectent la cellulose qu’ils transforment dans leurs intestins afin de nourrir par trophallaxie (régurgitation de l’aliment) les autres membres de la colonie. Ils réparent également la termitière et prennent soin des jeunes. Des soldats assurent la défense de la colonie. Cette organisation, basée sur la coopération et l’entraide, pourrait être un modèle de société humaine.

Dans les sous-bois, il y a une grande diversité de fourmis, à la démarche lente ou rapide, qui s’éclipsent dès que vous perturbez leur milieu. Elles sont certes dérangeantes, mais tellement utiles pour la nature, car intervenant dans la régénération et l’aération des sols à l’instar des vers de terre ou des termites qui nichent dans le sol. La présence de nombreux insectes pollinisateurs – papillons, mouches, guêpes, abeilles sauvages ou domestiques – rappelle leur rôle dans le maintien de l’intégrité des différents écosystèmes et la nécessité de préserver leurs habitats, car ils sont responsables de la diversité variétale végétale.

La dégradation de la biodiversité met en péril le dévelop- pement économique. Il est nécessaire de la préserver, de conserver les gènes, les espèces et les écosystèmes. Pour cela, il est impératif de faire face aux menaces que représentent la modification des habitats, la prolifération des espèces exotiques envahissantes, la pollution. La mise en place de stratégies comme un système de contrôle et de surveillance phytosanitaire et une réglementation stricte, de systèmes de suivi de la biodiversité (indicateurs), afin de favoriser les alertes précoces, est un des défis majeurs de Saint-Barthélemy afin de conserver durablement sa biodiversité.

This post is also available in: Anglais